La guilde d'Adûnakhôr

par **Docteur Poisson** Mar 10 Aoû 2010 - 10:59

La guilde d’Adûnakhôr

Chapitre 1 : Jogging en slip

Le chasseur avançait précautionneusement dans la neige, jetant des regards inquiets autour de lui. Le bruit feutré de ses pas et le sifflement du vent étaient les seuls sons qui troublaient la quiétude du mont enneigé. L’après-midi était bien avancé et le soleil faisait quelques timides apparitions à travers les nuages, que le chasseur frigorifié guettait avidement.
Après avoir marché durant environ un quart d’heure il se laissa choir sur un rocher, épuisé. La froideur du sol s’infiltrait à travers ses bottes trempées et une bise glacée piquait son visage telle une centaine d’aiguilles. Il poussa un juron et sortit une fiole de son sac à dos. Il la porta à sa bouche et en retira le bouchon avec les dents. Une fois que tout le breuvage chaud eut coulé dans sa gorge il se releva en grognant et reprit sa route. La fatigue commença à le gagner mais il savait que s’il s’endormait, il mourrait tué par le froid. Prenant son courage à deux mains et redoublant d’efforts, il avança avec une vigueur renouvelé. Il ne pouvait pas abandonner maintenant, la bête était proche, tellement proche.
Soudain il vit une empreinte dans la neige. Il se précipita pour l’examiner, le cœur plein d’espoir, et manqua pousser un crie de joie quand il se rendit compte que la patte griffu d’un giadrome était à l’origine de la trace. Un sourire étira les lèvres du guerrier qui dépassaient de la capuche en fourrure qu’il avait rabattu sur son visage pour se protéger du froid. Sa proie était désormais à portée de lame.
Il trottina aussi furtivement que possible en suivant la piste laissé par l’animal. Puis il s’arrêta en apercevant quelque chose dans la neige. Il sortit son épée et alla voir de quoi il en retournait.
Quoi que cela puisse être c’était trop petit pour que sa vision amoindrie par le froid ne puisse le distinguer à moins de quelque mètre, voir de quelques centimètres, alors, il se pencha au dessus de la mystérieuse apparition en fronçant les sourcils.
- On dirait du… caca.
Le chasseur poussa un long soupir de découragement en se rendant compte qu’il était penché au dessus d’excréments. Furieux contre lui même, il rangea son arme et releva la tête… pour se retrouver nez à nez avec le giadrome.
La bête mesurait un peu moins de deux mètres de haut et avait le corps couvert d’écailles immaculées. Une crête bleue saillait sur sa tête rectangulaire terminée par un bec garni de longs crocs pointus et d’immenses griffes se dressaient, menaçantes, au bout de ses pattes antérieures. Un grognement monta de la créature qui plissa ses petits yeux sournois.
- Coucou toi ! s’exclama joyeusement notre héros avant de tourner les talons et de s’enfuir en courant.
Une course effrénée s’engagea. L’homme, qui avait pris la bête par surprise, parvint à s’assurer une avance confortable mais, malheureusement pour lui, il était incapable de rivaliser avec l’endurance et la vitesse du monstre. Retardé par sa lourde combinaison et affaiblie par une journée de traque, il perdit vite du terrain.
Bientôt il put entendre les jappements surexcités du carnivore sur ses talons. Alors que tout semblait perdu un plan aussi stupide qu’insensé germa dans son esprit.
Il se tourna et fit face au giadrome puis il balança vers lui une petite sphère. Elle éclata et une vive lumière s’en dégagea, aveuglant temporairement le prédateur. Lorsqu’il reprit ses esprits il vit que l’homme avait prit de l’avance et surtout, qu’il était en caleçon.
- Bordel de merde de saloperie de nom de dieu, ça caille ! hurla le fuyard qui n’avait conservé que son arme, soigneusement rangé dans un fourreau attaché par une bandoulière à son épaule. Allégé et poussé par l’énergie du désespoir il courut aussi vite qu’il en était capable. Alternant entre jurons et pleurnichements il prit une avance considérable sur l’animal mais celui-ci, apparemment de très mauvaise humeur, passa à la vitesse supérieure et se rapprocha dangereusement.
Tout à coup le guerrier aperçut une silhouette dans la neige. Retrouvant un peu d’espoir il gueula tout ce qu’il put et fit de grands signes frénétiques.

Drakain était un chasseur sans histoires du fait de sa grande fainéantise. En effet il ne se contentait que des quêtes de bas niveaux afin de ne prendre aucun risque, de gagner tout de même suffisamment d’argent pour vivre et de rendre service à la guilde. La vérité était qu’il avait un don : il sentait venir les ennuis et les évitait soigneusement.
Voilà pourquoi cet homme paisible et indolent avait très vite compris, en voyant un fou furieux aux cheveux ébouriffés courir vers lui, en slip dans la neige, qu’il allait avoir un sacré paquet d’emmerdements.

par **Docteur Poisson** Ven 13 Aoû 2010 - 19:49

Chapitre deux : Drakain

-Aides moi il va me bouffer ! hurla l’individu en sous vêtement en courant vers Drakain.
- De quoi !?
- Il va me bouffer !
-Qu… quoi !?
- Il va me bouffer !
- Oui j’ai entendu, mais qui va te bouffer ?
- Il va me bouffer !
L’homme paniqué arriva au niveau du guerrier et se mit à gesticuler en émettant une série de sons stridents. Au milieu des divers borborygmes qui sortaient de sa bouche le combattant crut comprendre «breuvage chaud ». Il se hâta donc de sortir une fiole contenant une substance pourpre de son sac. L’étrange personnage avala goulûment le contenu de la petite bouteille et s’essuya la bouche du revers de la main, puis il prit la parole d’une voix saccadé.
- Gia… fla… courir, bégaya t-il.
- Pourriez-vous être plus clair ?
- Giadro… flash… me poursuivre ! S’exclama le malheureux d’une voix tremblante en levant un regard courroucé vers Drakain.
- Non mais rien à faire ! Je ne pige rien !
La peau du rescapé vira au rouge et il avala bruyamment sa salive avant d’expirer longuement, après quoi, il tenta à nouveau de s’exprimer.
- J’ai suivis les traces d’un giadrome mais il m’a trouvé en premier et m’a poursuivit.
Le visage du chasseur en armure se décomposa.
- Un giadrome, où ça !? S’exclama-t-il en jetant des regards alarmés aux alentours.
Puis il remarqua une ombre au loin qui grandissait à vue d’œil.
- Oh non ça me va me faire des embêtements tout ça ! Geignit-il en contemplant la bête qui approchait à toute vitesse.
L’homme en slip en profita pour étudier l’aspect de son sauveur. Grand et fort il arborait une armure toute simple constitué d’une cotte maille couverte de plaques de fer. Son torse musculeux et ses bras énormes se devinaient sous son équipement. Une tignasse brune et désordonnée couvrait sa tête et ses yeux, d’un vert profond, surplombaient un nez qui avait dû être cassé à plusieurs reprises. Malgré tous ces détails il n’émanait pas de puissance de cet homme, et c’était même le contraire ! Ses gestes lents et son air exaspéré le rendaient soporifique. Le guerrier se rendit soudain compte qu’il était observé et le voyeur baissa les yeux avec embarras.
- Bon comment on fait pour s’en sortir ? Dit-il, plus pour détendre l’atmosphère que pour trouver une réel issue.
- Je ne sais pas, je n’ai qu’une masse en os pour me défendre, mais je doute que cela soit suffisant pour vaincre cette bestiole.
-Moi j’ai eum… un kriss en os parce que je pensais que ce serait une petite bête, donc nous ne sommes pas plus avancés.
- Ca ne pourrait pas être pire, grommela Drakain.
- Eh, ne te plains pas ! Toi t’es pas en train de crapahuter en slip dans la neige !
- C’est un caleçon…
- Non c’est un slip, ça se voit pourtant.
- Un caleçon.
- Oh puis merde, voilà ! On est sur le point d’se faire charcuter et tu mattes mon slibard, t’as rien de mieux à foutre !
-J’ai peut être une idée ! S’exclama soudain le colosse.
- Mouaim, mais si ça concerne encore mon slip tu peux te la mettre où je pense !
Son « équipier » le fusilla du regard.
- Je m’en fous de ton slip, j’ai peut être un objet qui pourra nous sortir de cette mauvaise passe.
- En même temps, sans vouloir la ramener, grand et fort comme tu es, surtout que t’as une armure en mailles, tu pourrais bien le zigouiller !
- Je euh oui mais… pourquoi je me fatiguerai alors que j’ai l’objet parfait !
- Tu marques un point. Bon que vas-tu utiliser ?
- Un baril de poudre, et d’ailleurs c’est toi qui va l’utiliser puisque c’est ton monstre.
- Ouais mais c’est ton baril !
- On s’en moque, il faut faire vite il est presque sur nous !
En effet le monstre n’était qu’à quelques mètres de là et les deux chasseurs pouvaient désormais entendre ses piaillements haineux. Le combattant au marteau se hâta d’enlever son sac à dos et de le jeter à son compagnon.
- Tiens c’est le baril de gauche, dépêches toi !
- Je l’ai !
- Bien, maintenant pose le prés du giadrome et allumes la mèche, ça ne le tuera probablement pas mais au moins il va avoir les chocottes de sa vie !
- Compris j’y cours ! S’écria le jeune homme en fonçant vers la bête.
Soudain Drakain remarqua quelque chose de plutôt gênant.
- Mais… mais il a pas pris la bonne bombe ce con là ! Reviens espèce de demeuré, tu t’es trompé ! Brailla t-il en vain.
Une fois qu’il ne fut plus qu’à quelques mètres de sa proie le chasseur en herbe installa l’explosif et se tint prêt. Il lui sembla entendre son camarade d’infortune crier quelque chose au loin mais il se dit que c’était le fruit de son imagination. Voyant que le prédateur était assez prêt il arma le petit tonneau.
Le giadrome poussa un cri de rage et se jeta sur lui. A ce moment là, la mèche finit de se consumer et il y eut une petite détonation. Sous les yeux médusés de l’assistance le tonnelet fila vers la gueule grande ouverte de la créature et elle l’avala sans le vouloir. Stupéfait, le chasseur en sous vêtement regarda le monstre qui se tenait, immobile, face à lui. Les yeux écarquillés et l’air encore plus surpris que son ennemi, il émit un petit « Croak ? » interrogatif. L’instant d’après son crâne explosa, projetant des morceaux de cervelle aux alentours et maculant la neige de sang rouge vif.
Drakain, qui s’était empressé de rejoindre son collègue, le retrouva couvert d’une substance visqueuse, assis à même le sol glacé. Il leva vers lui un regard hagard.
- Tu vois je pensais que ça ne pouvait pas être pire mais maintenant, en plus d’être en slip dans la neige, je suis couvert de cerveau. Comme quoi, il est toujours possible de s’enfoncer plus profondément dans la merde. En plus il me fallait ses crocs et au dessus du cou, rien n’es récupérable, c’est plutôt moche.
Comme pour corroborer ses dires, le cadavre décapité s’affaissa avec un bruit spongieux dans une flaque de sang.
- Jamais vu quelqu'un utiliser une bombe rebond comme ça, murmura le géant en contemplant le carnage.

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